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  • Photo du rédacteurCamille Floderer

Accoucher en plateau technique



J'ai choisi le métier d'ostéopathe car je pense que le corps possède toutes les clés et les ressources nécessaires à la vie ; et que nous pouvons apporter un coup de pouce naturel à l'harmonie de cet équilibre corporel : l'Homéostasie. La grossesse et l'accouchement sont des étapes merveilleuses de la vie d'une femme, qui ne sait finalement jamais à quoi s'attendre réellement tant qu'elle ne l'a pas vécu.


Mon projet de naissance s'est imposé tout naturellement dans la continuité de mes choix de vie, je voulais un accouchement naturel, guidé par mon instinct, accompagné dans l'intimité avec cette intime conviction que j'en étais capable, puisque l'espèce humaine a survécu jusqu'ici et que la médecine est finalement une alliée assez tardive dans l'évolution de la société et un confort qui finalement n'est pas accessible à toutes les femmes de la Terre.


Amour n'a pas été difficile à convaincre. C'est dans un respect et un soutien total qu'il m'a suivie dans ce projet car je suis la seule maîtresse de mon corps. Il est confiant, il a la force et le courage nécessaire de vivre cette expérience extraordinaire.


Alors pourquoi un plateau technique et pas un accouchement à la maison ?


Tout d'abord, le plateau technique est un espace réservé et intime, disposant de nombreuses possibilités pour vivre son accouchement, au sein d'un établissement spécialisé. Quand bien même l'arrivée de la médecine est assez récente [du point de vue de l'évolution de l'Humanité], l'accouchement n'est pas anodin. Chaque femme, chaque grossesse et chaque enfant est unique. Si le moindre problème survient, tout le monde est déjà sur place pour être pris en charge par une équipe compétente.


Un tel projet se prépare bien en avance. Pour les grandes lignes, le suivi médical reste classique et il est vraiment très important que tout se passe parfaitement pour espérer accéder au plateau technique. J'ai choisi de me faire suivre par le cabinet "Au fil du féminin" où toutes les sages femmes sont formées à l'accouchement physiologique et naturel. J'ai indiqué très tôt vouloir accoucher au plateau technique car le nombre de "place" est limitée. Cet accompagnement global demande un investissement énorme de la part des sage- femmes. Je les ai toutes rencontré, car on ne sait pas laquelle sera d'astreinte le jour où bébé aura décidé de pointer le bout de son nez et que c'est important de tisser des liens avec la personne qui entrera dans votre intimité dans ce moment précieux.


Le suivi médical reste classique au cours de la grossesse. Tout était parfait pour moi, j'allais avoir droit au plateau technique.


C'est la préparation à l'accouchement qui porte bien son nom. Les sages femmes qui m'ont suivie ont une approche très naturelle de la naissance. On nous prépare à vivre l'accouchement. On part de l'anatomie féminine, puis on passe par des signes précurseurs qui mettent la puce à l'oreille sur un travail qui ne tardera pas à se déclencher, la bulle hormonale et les différents états qui vont l'accompagner. On voit quelques exercices respiratoires, positions, massages, accompagnement de nos chers partenaires mais on garde en tête qu'un accouchement ne s'apprends pas dans la théorie pour être ressorti comme un examen le jour J. Il se vit.


On m'a estimé un bébé à 3,400kg à la 3e échographie. C'est la moyenne, je suis confiante.

Bébé est arrivé pile le jour prévu, ni en avance, ni en retard. Le même jour, chez les sages femmes, c'est Marion qui est d'astreinte.


Les contractions ont commencé très tôt ce matin là, vers 4h30, le bain chaud ne les arrête plus, ça se précise. J'encourage Amour à partir au travail quand même, il rentrera tôt tout de même puisqu'il est du matin, il garde bien son téléphone sur lui. Et prend des nouvelles très régulièrement.


La sage femme, Marion, fait un premier passage à la maison, l'ouverture est à 1 cm. Mais ce n'est pas encore le vrai travail. Elle me dit que ce sera pour aujourd'hui ou pour demain. Les contractions ce n'est pas aussi compliqué que ce qu'on en dit je trouve, mais c'est vrai que 7 à 8 par heure ça peut vite devenir fatiguant.


Amour rentre du travail, j'insiste pour qu'on aille honorer un rendez vous auquel je tenais avant mon accouchement. Nous ferons 2 fois 40 minutes de route, mettant cette thérapeute dans tous ces états d'inquiétude et c'est bien compréhensible. Le trajet du retour a été particulièrement compliqué, les contractions se rapprochaient et devenait plus fortes.


Vers 18h30, le calme plat d'un coup. Ça fait du bien de respirer un peu. Marion m'appelle pour prendre des nouvelles et me demande si mon état nécessite qu'elle arrive immédiatement ou si elle peut suivre son programme personnel et que je la tienne informée de l'évolution de la situation. A ce moment là je vais bien et quoiqu'il en soit, elle passera à la maison vers 22H00. Elle garde son téléphone tout près d'elle si j'ai besoin.


Ce calme, était celui d'avant la tempête...Les contractions deviennent celles du travail et n'ont plus rien à voir avec celles "qui n'étaient pas si compliquées que ça". Le travail suit son cours dans l'intimité du foyer, les lumières sont atténuées, le bain est chaud, tout est familier, Amour a aussi de quoi s'occuper. Il s'occupe de moi quand j'en ai besoin et s'occupe l'esprit, il peut faire ce qu'il veut il est chez lui.Il se repose aussi.


J'ai fait 2 choses stupides ce soir là : j'ai noté les heures de mes contractions sur un morceau de papier pour en évaluer le rapprochement. Non seulement ça ne m'a pas aidé mais ça m'a surtout paru interminable. La deuxième chose stupide, c'est que je me suis pomponnée. A force de voir des photos de nanas pimpantes prises en plein peau à peau, ou tout ce qu'on peut voir dans des émissions TV, je me suis dit que moi aussi j'avais le droit d'afficher une jolie tête une fois mon bébé dans les bras. Illusion totale !


Le temps s'est mis à passer différemment...

21H30 : Accroche toi ma grande, Marion ne va pas tarder.

21H45 : Allez on y est presque

22H00 : Elle va pas tarder ouf...

22H15 : Pourquoi elle est toujours pas là ça ne va plus je ne tiens plus !!!! Je lui envoie un SMS. Non, Amour envoi un SMS, appelle là fait ce que tu veux mais il faut qu'elle arrive.

22H45 : Marion arrive. On installe le monitoring, bébé va super bien, c'est un champion. Moi ça ne va plus DU TOUT !! Le col est ouvert à 5cm, la moité du travail est fait. Plus rien n'existe autour de moi, la bulle hormonale m'entoure complètement. Il est temps de partir vers l'hôpital, si on attends plus je risque de ne plus supporter la route, il est 23h10.


La route est interminable mais il semble que je trouve une position satisfaisante dans la voiture. Je me mentalise au niveau de l'esprit comme concentrée dans une petite bille, qui vient se loger au niveau de mon crâne, entre les yeux mais légèrement en arrière. Ma boite crânienne devient alors un espace de flottaison vide et calme, en équilibre. Il n'y a plus de son, la bille est seule a émettre cette très légère lumière bleue apaisante et douce. Parfois elle est tirée vers le bas et la lumière s'intensifie à chaque coup mais je tiens bon.


Je regagne consciemment mon corps, il est 23h30, heure d'arrivée à l'hôpital. Dernière étape avant d'accéder au plateau, s'assurer qu'il est disponible. Et oui, comme un accouchement est imprévisible, il est impossible d'émettre une réservation. Par chance, c'est le cas ce soir. Marion va préparer le nécessaire à mon admission et à l'accouchement.


Nous y voila. La pièce est beaucoup plus grande qu'une chambre classique. J'ai quand même eu ce petit pincement au cœur parce qu'elle rappelle quand même l'hôpital : l'odeur, l'aménagement, les matières, le matériel... Mais elle dispose d'équipement intéressants : des ballons de différentes tailles, des coussins de toute taille, une banquette ronde très large et basse, des draps qui pendent du plafond permettant de s'y suspendre et d'y faire des nœuds si on souhaite régler la hauteur et une baignoire absolument incroyable !





On finit par s'y retrouver quand même grâce à la lumière tamisée et une petite enceinte nous permet d'avoir une musique de fond. J'ai voulu des reprises lounges de chansons connues. Amour m'a dit après qu'il a même surpris Marion à chanter ... Elle aussi est dans l'attente, et elle reste là près de nous, elle a intégré notre bulle.... Pour l'odeur, c'est en ajoutant des huiles essentielles spécifiquement choisies dans le bain bouillant que j'ai de nouveau eu cette sensation de cocon.


Deux longues heures passent dans ce bain où je tourne indéfiniment pour tenter de supporter l'intensité de ces contractions qui n'en finissent plus. Marion reste en retrait, elle a l'habitude, elle interviendra lorsque des signes lui indiqueront qu'une prochaine étape est à venir. Amour se sent impuissant et moi je n'arrive pas à m'exprimer. Je le veux près de moi, mais j'ai besoin d'air aussi, l'air ambiant et l'eau sont tous les deux très chauds pour préparer l'arrivé de bébé. Mais je n'accoucherai pas dans la baignoire, ici c'est interdit, en cas d'hémorragie, c'est trop compliqué de me sortir de là. Cette ambiance très chaude et la fatigue ont eu raison de l'apparence de princesse que j'ai tant espérer pouvoir donner sur les premières photos. Aujourd'hui c'est même sujet à boutades dans la famille.

Durant ces heures, quelques exercices de respirations me reviennent et je suis très bien accompagnée en les faisant. Mais malgré tout, je passe à plusieurs reprises dans la phase de désespoir, "Je n'y arriverai jamais c'est trop dur, donnez moi cette péridurale ou laissez moi mourir, je n'en peux plus..." Amour et Marion sont là, ils me rassurent, m'encouragent... ils s'occupent bien de moi, je suis rassurée...


Un nouveau calme s'amorce, Amour dans son impuissance se pose beaucoup de question, est ce que tout va bien? Est ce normal, que se passe-t-il maintenant ? Grâce au système waterproof du monitoring, on suit le cœur de bébé qui est un vrai battant. Tout va bien pour lui. Mais il est temps de sortir de la baignoire pour voir où on en est. Si l'ouverture n'est pas totale, je réclame la péridurale. La sortie du bain amorce enfin la perte des eaux et l'examen est formel, l'ouverture est complète... De fatigue et de soulagement, je m'endors...


Ce n'est qu'un demi sommeil, je devine une certaine activité autour de moi. Ça fait malgré tout presque 24H que tout à commencé. Amour s'inquiète une nouvelle fois et Marion continue de le rassurer.


Une pensée me traverse l'esprit à ce moment là : "Maintenant que les portes sont ouvertes il va peut-être être temps de se mettre à pousser". C'est complètement stupide. Mon corps n'était pas prêt il ne l'a pas réclamé. Il n'avait pas envie de pousser. D'autant plus que je voulais accoucher debout, suspendues à ces draps qui pendent au plafond, m'aidant de la gravité terrestre pour aider ce bébé à descendre. Marion a été vraiment top à ce moment là car elle s'est contorsionnée comme elle pouvait pour m'aider à accueillir le petit champion. Mais nos efforts respectifs ont été une perte d'énergie considérables puisque le corps ne l'avait pas décidé. Marion a repris les choses en mains en me proposant une position plutôt sur le dos où Amour pourrait être actif.


Cette fois-ci le corps réclame la poussée et les efforts s'intensifient pour sortir ce bébé qui pèsera au final 4,150kg. Je reviendrai dans un autre article sur des sensations et comportements tabous lié à l'arrivée du bébé, ainsi que sur le rôle du père au cours de l'accouchement.


Ici, il y aura pratiquement 2H de poussées. Vu que tout s'est bien passé, on attendra que le cordon arrête de battre pour le couper... A l'issue, les soins et les démarches administratives sont les mêmes qu'ailleurs autant pour la maman que pour le bébé et je ressemble à un zombie sur la photo souvenir.


Au plateau technique, si tout s'est bien passé, vous êtes de retour très rapidement chez vous. En donnant naissance à 3H30, nous étions tous dans nos lits respectifs à 7H30. Les sage- femmes sont passées chaque jour pendant 7 jours pour contrôler la santé de tout le monde.


Je suis ravie que vous ayez pris le temps de lire ce témoignage. J'espère avoir pu éclairer votre propre projet de naissance et répondre à la plupart de vos interrogations.


Sur le même sujet : (prochainement disponibles sous forme de lien)

La place de l'autre parent dans l'accouchement

Un tabous de l'accouchement

Le plateau technique, remise en cause des convictions d'ostéopathe et de femme.

Les avantages du retour rapide à la maison après l'accouchement en plateau technique.




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